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Lettre d’information franco-allemande 15 Juil 2016

Lettre d’information franco-allemande | Juillet 2016

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Par le biais de cette Lettre d’information bilingue, nous souhaitons vous tenir informés de l’actualité juridique et fiscale allemande et française. Cette Lettre est rédigée par l’Équipe franco-allemande de GGV qui a pour vocation de conseiller les entreprises françaises et venant de pays francophones sur le marché allemand, et les entreprises allemandes et de pays germanophones sur le marché français.

Contenu

Actualités France

  1. Prélèvements sociaux : un espoir pour les personnes dépendant d’un régime social non-européen
  2. Prêts interentreprises
  3. Nouvelle possibilité de transiger avec l’URSSAF et l’Inspection du Travail
  4. Sous-traitance de production : précisions sur la notion « d’achat » (suite de notre article, édition 04/2016)
  5. La réforme du Code de la consommation entre en vigueur le 1.7.2016
  6. Sanction d’un défaut de sécurité des données clients

Actualités Allemagne

  1. Modifications du droit des clauses abusives: Inadmissibilité de l’exigence de la forme écrite
  2. Menace de multiplication des mises en demeure en cas de violation des règles d’information envers les consommateurs (2ème partie)
  3. Droit de l’agent commercial à une indemnité en cas de rupture du contrat
  4. Modernisation de la procédure d’imposition à partir de 2017 en conservant la complexité du système fiscal allemand.
  5. Nouvelles modifications de la Loi allemande sur le travail temporaire prévues au 1.1.2017

Actualités France

Prélèvements sociaux : un espoir pour les personnes dépendant d’un régime social non-européen

La cour administrative d’appel de Marseille considère que l’application de prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine à des personnes dépendant d’un régime social non-européen porte atteinte à la liberté de circulation des capitaux.

La CJUE a jugé, le 26.2.2015, dans un arrêt « de Ruyter », que les prélèvements sociaux français (15,5% depuis 2012) n’étaient pas applicables aux revenus du patrimoine perçus par des personnes dépendant d’un régime social de l’Espace Economique Européen (EEE) et de la Suisse. Pour rappel, cette décision de la CJUE se fondait sur un règlement européen qui empêche une personne d’être soumise à deux régimes sociaux différents.

Cette décision laissait ouverte la question de l’application des prélèvements sociaux aux personnes dépendant d’un régime de sécurité sociale d’un pays hors Espace Economique Européen et Suisse.

La cour administrative d’appel de Marseille a jugé le 25.3.2016 que la décision « de Ruyter » n’était pas applicable aux résidents français dépendant de la sécurité sociale monégasque. Elle a toutefois jugé que la discrimination qui en résultait entre les résidents français dépendant d’un régime social d’un pays de l’EEE et Suisse et d’un régime social d’un autre pays était attentatoire à la liberté de circulation des capitaux. Les prélèvements sociaux sont d’après la cour remboursables, à l’exception de la CSG qui est couverte par la clause de gel (le revenu en question était une plus-value de cession de valeurs mobilières).

Même si cette décision a fait l’objet d’un recours de la part de l’administration fiscale devant le Conseil d’Etat, elle laisse espérer que l’application de prélèvements sociaux aux non-résidents dépendant d’un régime social hors EEE et Suisse soit également considérée par le Conseil d’Etat comme une discrimination attentatoire à la liberté de circulation des capitaux. Une décision du Conseil d’Etat en ce sens ouvrirait la voie à un remboursement au moins partiel des prélèvements sociaux payés jusqu’en 2015. Le remboursement pourrait même être quasiment total pour les prélèvements sociaux sur les revenus et gains immobiliers.

Une décision du Conseil d’Etat confirmant celle de la cour administrative d’appel de Marseille ne rouvrirait pas les délais ayant déjà expiré pour contester. Dans la mesure où il est peu probable que le Conseil d’Etat juge cette affaire définitivement avant 2017, il est dès lors recommandé de déposer sans plus attendre une réclamation dans les délais fixés par le droit français, en particulier pour la contribution payée en 2014, dont le droit à réclamation expire au 31.12.2016.


Prêts interentreprises

La loi Macron du 6.8.2015 a autorisé, sous certaines conditions, le prêt d’argent entre entreprises, créant ainsi une dérogation supplémentaire au monopole bancaire en la matière. Le décret d’application est entré en vigueur le 25.4.2016.

Jusqu’à présent les prêts interentreprises étaient autorisés uniquement à titre exceptionnel. Les entreprises peuvent désormais consentir de façon régulière des prêts à d’autres entreprises, sous les conditions suivantes :

  • L’entreprise prêteuse doit être une société par actions (SA, SAS, SCA) ou une société à responsabilité limitée (SARL), dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes ;
  • L’entreprise bénéficiaire doit être une microentreprise, une PME ou une entreprise de taille intermédiaire (ETI) ;
  • L’entreprise prêteuse et l’entreprise bénéficiaire doivent entretenir entre elles des liens économiques justifiant l’octroi de prêt (par exemple une relation de sous-traitance, de franchise, de location-gérance, ou une licence d’exploitation de marque ou de brevet…) ;
  • L’octroi du prêt ne doit pas avoir pour effet de placer l’entreprise bénéficiaire dans un lien de dépendance économique ;
  • Le prêt ne doit pas avoir une durée excédent deux ans.

A ces conditions s’ajoutent celles liées aux capitaux propres et à la trésorerie nette minimum de l’entreprise prêteuse et au montant total des prêts consentis au cours d’un même exercice comptable.

Par ailleurs, l’octroi du prêt ne peut avoir pour effet de contourner les règles applicables en matière de délais de paiement prévues par le Code de commerce (pour rappel, 60 jours ou 45 jours fin de mois à compter de la date facturation).

Ces dispositions ne s’appliquent toutefois pas aux opérations de trésorerie intragroupe, qui demeurent soumises aux règles applicables, suivant chaque type de société, aux conventions réglementées.


Nouvelle possibilité de transiger avec l’URSSAF et l’Inspection du Travail

La Loi de Financement de la Sécurité sociale pour 2015 a instauré la possibilité de transiger avec l’URSSAF. Le Décret du 15.2.2016 fixe les conditions et modalités d’un tel rapprochement. Une ordonnance du 7.4.2016 permet également de transiger avec l’Inspection du Travail pour certains délits et contraventions.

Depuis le 18.2.2016, les employeurs ont la possibilité de transiger avec l’URSSAF afin de mettre fin à des contestations liées, notamment, à l’application des majorations et des pénalités de retard, à l’évaluation des avantages en nature, aux avantages en argent et aux frais professionnels, ou encore à l’évaluation des montants des redressements.

Pour ce faire, l’employeur doit cependant être à jour de ses obligations déclaratives et de paiement à l’égard de l’URSSAF. Après réception de la mise en demeure de l’URSSAF portant sur les sommes objet du litige, il doit solliciter une transaction par lettre recommandée avec A.R.

Le Directeur de l’URSSAF dispose ensuite d’un délai de 30 jours pour donner une suite à cette proposition, pendant lequel la procédure de redressement et les délais de prescription sont interrompus. A défaut de réponse sous ce délai, la réponse de l’URSSAF est réputée négative.

En cas de réponse positive, un protocole transactionnel doit être régularisé entre les parties et soumis à l’approbation de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale.

Il convient toutefois de préciser que la transaction ne met pas fin à la possibilité pour l’URSSAF d’opérer un nouveau redressement sur les points évoqués dans la lettre d’observation, lors d’un contrôle ultérieur. Il est donc préférable de corriger les pratiques qui ont été critiquées dans la lettre d’observation.

A noter par ailleurs que depuis le 1.7.2016, il est également possible de conclure des transactions pénales avec l’Inspection du Travail, en cas de contravention ou de délit puni d’une peine d’emprisonnement inférieure à un an (et notamment en matière de durée du travail, de recours au CDD, d’égalité de salaire).

La procédure prévoit que le Directeur de la DIRECCTE formule une proposition de transaction, en laissant à l’employeur un délai d’un mois pour l’accepter (son silence vaut refus). En cas d’acceptation par l’entreprise, la transaction doit être homologuée par le Procureur de la République.


Sous-traitance de production : précisions sur la notion « d’achat » (suite de notre article, édition 04/2016)

Un décret du 1.3.2016 a fixé à € 500.000 le seuil au-delà duquel une convention écrite doit être conclue pour tout achat de produits manufacturés, fabriqués à la demande de l’acheteur en vue d’être intégrés dans sa propre production. Une incertitude subsistait sur l’opération d’« achat » à laquelle ce seuil avait vocation à s’appliquer. Selon la DGCCRF, le seuil s’applique à toute commande prise isolément.

Suivant la réforme dite Loi Hamon du 17.3.2014, l’article L. 441-9 du Code de commerce dispose désormais que toute sous-traitance de production ou tout achat de produits manufacturés, fabriqués à la demande de l’acheteur en vue d’être intégrés dans sa propre production, doit faire l’objet d’une convention écrite dont les mentions obligatoires sont précisées par la loi. Un décret du 1.3.2016 a fixé à € 500.000 le seuil au-delà duquel une convention écrite est obligatoire.

Néanmoins, l’application du décret laissait subsister des incertitudes majeures relatives à la notion « d’achat » à laquelle s’applique le seuil.

Interrogée par nos soins, la DGCCRF indique qu’« achat » s’entend strictement et renvoie à la notion de commande. Autrement dit, l’« achat » dont il s’agit ici ne peut pas être réalisé en plusieurs commandes, même si celles-ci procèdent d’un même contrat cadre.

En conséquence, les parties peuvent formaliser leur relation contractuelle par la « convention écrite » dès la passation d’une commande d’un montant supérieur au seuil de € 500.000.

En tout état de cause, la convention devra être rédigée au plus tard lors de la conclusion de l’achat, à savoir, selon le cas, lors de la réception ou de la confirmation de la commande.


La réforme du Code de la consommation entre en vigueur le 1.7.2016

Par une ordonnance n°2016-301 du 14.3.2016, le Gouvernement a procédé à une recodification de la partie législative du Code de la consommation.

La réforme répond à un objectif de meilleure accessibilité et cohérence des dispositions du Code de la consommation, devenu inadapté suite aux récentes réformes intervenues dans le domaine du droit de la consommation, notamment la Loi Hamon du 17.3.2014.

Cette réforme est essentiellement à droit constant, à l’exception de quelques modifications rendues nécessaires pour remédier, entre autres, aux insuffisances de codification.

Le champ d’application du Code de la consommation est ainsi clarifié avec la modification de l’article liminaire qui comporte désormais une définition complétée de la notion de consommateur ainsi qu’une définition du professionnel et du non-professionnel.

Par consommateur, on entend désormais « toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».

Le non-professionnel est défini comme : « toute personne morale qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».

Enfin, le professionnel s’entend de : « toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu’elle agit au nom ou pour le compte d’un autre professionnel ».

Le Parlement a également habilité le Gouvernement à aller au-delà du droit constant en matière de pouvoirs d’enquête des agents de contrôle. Leurs pouvoirs et les procédures d’enquêtes sont simplifiés et regroupés au sein d’un nouveau livre V.

Si seule la partie législative du Code de la consommation fait aujourd’hui l’objet d’une refonte, un décret est annoncé concernant sa partie réglementaire.


Sanction d’un défaut de sécurité des données clients

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a récemment condamné, en formation restreinte, la société Ricard (le pastis Ricard) pour « manquement à l’obligation de veiller à la sécurité et la confidentialité des données à caractère personnel », constaté lors de deux contrôles successifs du site internet « Ricard.com ».

La société Ricard a reconnu la défaillance de sécurité, des données personnelles (nom, date de naissance, email, téléphone, numéro tronqué de carte de paiement…) étant accessibles, mais a tenté de limiter sa responsabilité en arguant qu’elle n’avait à sa charge qu’une obligation de moyens.

Dans sa décision, la CNIL rappelle que :

  • L’existence d’une relation de sous-traitance n’exonère pas le responsable de traitement (ici la société Ricard) de ses obligations ;
  • Le manquement est caractérisé par le fait que les données sont accessibles et qu’elles l’étaient toujours lors du second contrôle ;
  • Le fait que les internautes n’aient subi aucun préjudice est inopérant, le manquement étant constitué dès lors qu’il n’y a pas eu de mise en œuvre de mesures visant à empêcher l’accès aux données par des tiers non autorisés.

Même si l’entreprise s’est depuis engagée à déployer un nouveau site internet, cette fois-ci sécurisé, la CNIL constate que le manquement est caractérisé, tout en limitant la sanction à un avertissement rendu public.

Cette sanction est justifiée par le nombre et la nature des données concernées par la faille de sécurité, la nécessité de sensibiliser les responsables de traitement à leurs obligations en la matière et par la persistance du manquement malgré l’alerte de la Commission.

Aucune amende n’a été prononcée. Elle aurait en tout état de cause été limitée dans le cadre de la loi informatique & libertés actuelle, et donc aurait pu ne pas être dissuasive.

En revanche, l’arme de la publication est efficace tant à l’encontre de la société en question que d’autres sociétés collectrices de données qui ne disposeraient pas d’un site sécurisé. Le mot d’ordre est donc, « Protégez la réputation de votre entreprise ».


Actualités Allemagne

Modifications du droit des clauses abusives: Inadmissibilité de l’exigence de la forme écrite

Les conditions générales de vente (CGV) contiennent généralement des clauses stipulant que certaines déclarations d’application et de sauvegarde des droits, comme par ex. une notification de vices ou l’exercice de droits, ne sont valables que si elles sont « écrites » ou présentées « sous forme écrite ». L’application de telles clauses sera bientôt illicite dans les relations juridiques avec des consommateurs.

Avec la « Loi sur l’amélioration de l’application des dispositions de droit civil concernant les mesures de protection des consommateurs selon le droit de la protection des données » du 17.2.2016, le législateur a également modifié le droit des CGV. Selon la nouvelle version de l’art. 309, n° 13 du Code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch – BGB), des dispositions contractuelles qui soumettent la validité d’annonces et déclarations vis-à-vis d’un utilisateur ou d’un tiers à une forme plus stricte que la forme écrite sont illicites dans les relations juridiques avec des consommateurs. Ainsi par exemple, les clauses d’exclusion telles que régulièrement prévues dans des contrats de travail ne doivent pas à l’avenir prévoir de revendication « écrite » des droits mais seulement une revendication « sous forme de texte » (par ex. par courriel ou fax). La modification de la loi ne concerne par contre pas les délais de forclusion prévus dans des conventions collectives, car ceux-ci ne sont pas soumis au contrôle des CGV selon l’art. 310, al. 4, phrase 1 BGB.

Des clauses relatives à la forme écrite prévoyant que des modifications du contrat ne sont possibles que par écrit continues à être licites. La raison en est que des accords contractuels (avenant, complément ou modification d’un contrat) – contrairement à des déclarations unilatérales portant sur l’application et la sauvegarde des droits ne sont pas compris dans le champ d’application de l’art. 309, n° 13 BGB.

La modification entrera en vigueur le 1.10.2016 et s’appliquera aux relations juridiques qui naîtront après cette date. Les entreprises devraient donc anticiper et vérifier leurs CGV afin de les adapter, si nécessaire, à la nouvelle législation.


Menace de multiplication des mises en demeure en cas de violation des règles d’information envers les consommateurs (2ème partie)

À compter du 1.2.2017, le catalogue des pratiques allant à l’encontre de la Loi allemande pour la protection des consommateurs va être élargi d’un nouvel élément : un entrepreneur risque une mise en demeure s’il ne communique pas aux consommateurs sur son site internet ou dans ses conditions générales de vente (CGV) des informations concernant sa participation à des procédures de règlement de litige.

L’élargissement de l’art. 2, al. 2 de Loi allemande sur les actions en cessation (Unterlassungsklagegesetz – UKlaG) (voir à ce sujet notre dernière édition, p. 12) est justifié, d’une part, par la Loi allemande de règlement de litige avec les consommateurs (Verbraucher-streitbeilegungsgesetz – VSBG) entrée en vigueur en début d’année, qui prévoit le transfert des litiges concernant des contrats avec des consommateurs des tribunaux ordinaires à des organismes de règlement extrajudiciaire de litiges. La VSBG est basée sur la Directive européenne 2013/11/UE relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation. D’autre part, l’élargissement de la loi repose sur le Règlement (EU) n° 524/2013 relatif au règlement en ligne des litiges de consommation (RLLC).

Ces deux normes ont pour point commun que les entrepreneurs qui vendent leurs produits online ou offline (en ligne ou hors ligne) ont des obligations d’informations envers les consommateurs – même si la participation à ces procédures de règlement de litiges (en ligne) est volontaire (exceptées certaines branches telles que par ex. le trafic aérien).

Selon les art. 36 et 37 VSBG, les entrepreneurs doivent informer les consommateurs dans quelle mesure ils participent à une procédure de règlement de litige de plein gré ou par obligation (I) et indiquer l’organe de conciliation des consommateurs compétent (II). Seules les entreprises employant moins de dix personnes ne sont pas soumises à la première obligation d’information (I). Ces indications doivent être communiquées au préalable sur le site Web (s’il existe, et ce de façon claire et compréhensible) ou dans le cadre des CGV en vigueur.

Selon l’art. 14 du RLLC, les entrepreneurs qui concluent des contrats de vente ou de prestations en ligne et qui proposent des marchés en ligne doivent insérer un lien à une plateforme de règlement de litiges en ligne. Il en est de même pour les adresses e-mail.

Si les entrepreneurs ne respectent pas ces obligations, ils pourront à l’avenir encourir le risque d’être poursuivis pour cessation ou suppression. Il est donc conseillé aux entrepreneurs de décider d’ici la fin de l’année s’ils veulent participer à de telles procédures de règlement de litiges ou non. En tous cas, les sites internet ainsi que les CGV en vigueur devront être adaptés en fonction de la nouvelle législation au plus tard au début de l’année prochaine.


Droit de l’agent commercial à une indemnité en cas de rupture du contrat

Pour la prise en compte du droit d’un agent commercial à une indemnité, les clients avec lesquels l’entrepreneur entretient déjà des relations commerciales mais que l’agent élargit aux marchandises faisant l’objet d’une relation commerciale spécifique sont également considérés comme « nouveaux clients ».

La CJUE a décidé (arrêt du 7.3.2016 – C-315/14) dans le cas d’un grossiste en lunettes, qui avait réparti son activité sur plusieurs agents commerciaux, de telle sorte que chaque agent commercial était responsable uniquement d’une certaine collection/marque. Dans le cas présent, il avait été confié deux collections de lunettes à une femme agent commercial qui faisait valoir son droit à une indemnité. Pour exercer son activité, le grossiste lui avait remis une liste d’opticiens avec lesquels il était déjà en relation commerciale concernant d’autres montures de lunettes. Lors de la résiliation du contrat d’agent commercial et du calcul de l’indemnité, la question se posa si les opticiens mentionnés devaient être considérés comme des nouveaux clients.

Selon la CJUE, la réponse à cette question dépend des marchandises qui avaient été confiées par l’entrepreneur à l’agent commercial. Ainsi, même si des clients étaient déjà en relation commerciale avec l’entrepreneur concernant d’autres marchandises, cela n’exclut pas le fait qu’ils peuvent être considérés comme des nouveaux clients acquis par l’agent, si celui-ci a réussi, par son intervention, à élargir les relations commerciales aux autres produits dont il avait la charge.

L’arrêt renforce par conséquent le but poursuivi par la Directive concernant les agents commerciaux (86/653/CEE) qui est de protéger les intérêts de l’agent commercial vis-à-vis de l’entrepreneur et il remet en cause l’interprétation du terme « nouveau client ». Dans la pratique, cet arrêt ne simplifie pas le calcul des indemnités auxquelles a droit un agent commercial. En effet, il faut estimer d’une façon équitable, les efforts investis par l’agent et la stratégie de vente particulière qu’il a appliquée afin d’obtenir la signature du contrat. Il faut donc globalement prendre en compte s’il était plus facile pour l’agent de vendre de nouvelles marchandises à des personnes déjà en relation commerciale avec l’entrepreneur.

Le droit de l’agent commercial à une indemnité ne peut d’ailleurs pas être exclu au préalable (§ 89b HGB – Code du commerce). La question se pose souvent, quand par exemple lors de l’acquisition d’une entreprise, l’ancien propriétaire doit assumer de façon transitoire encore pendant un certain temps les relations commerciales existantes avec les clients et être rémunéré pour cette activité sur la base de provisions.

Un concessionnaire qui ne travaille pas sur la base de provisions mais qui achète et revend les produits à son propre risque a également, lors de la résiliation du contrat et sous certaines conditions, un droit à indemnité vis-à-vis de l’entrepreneur (fabricant/fournisseur). Ce droit ne peut pas être exclu par avance, comme l’a constaté récemment la Cour fédérale de justice allemande (Bundesgerichtshof – BGH) (arrêt du 25.2.16 – VII ZR 102/15).


Modernisation de la procédure d’imposition à partir de 2017 en conservant la complexité du système fiscal allemand.

À partir de 2017, les déclarations fiscales devront être transmises par voie électronique et l’imposition sera automatisée. Cependant, le droit fiscal allemand complexe ne sera pas fondamentalement modifié.

Jusqu’à présent, toute déclaration télétransmise est traitée comme une déclaration sur papier et est saisie à nouveau manuellement pour des raisons d’informatique. Dorénavant, toute déclaration sera transmise par voie électronique et les annexes seront scannées avec, si nécessaire, un texte libre complémentaire. Les données déjà communiquées au fisc par des organismes (cotisations d’assurance et retraites) ainsi que les propres données du fisc comme les acomptes trimestriels et les intérêts seront déjà visibles dans la déclaration pré remplie similaire aux déclarations pour l’IRPP en France.

Dans la plupart des cas, l’imposition sera automatiquement réalisée par le système informatique et les avis d’imposition seront transmis par voie électronique et non plus en version papier. L’idée est d´identifier les déclarations typiques pouvant être acceptées sans vérification (« cas général ») et de contrôler les autres sur la base d’une sélection aléatoire ou de risque. Comme la fiscalité allemande n’est pas simplifiée mais, au contraire, devient de plus en plus complexe en raison de dispositions individuelles au cas par cas, le succès de ce projet est plutôt douteux. Les pièces justificatives ne doivent plus être jointes à la déclaration mais elles doivent être conservées pour présentation ultérieure sur demande du fisc. Il faut d’ailleurs s’attendre à ce que le fisc les réclame quand-même, notamment les justificatifs de dons.

Pour les périodes d’imposition, les changements ci-après s’appliquent : La date limite de dépôt de la déclaration va être prolongée jusqu’au 31 juillet de l’année suivante ; en cas d’assistance par un conseiller fiscal, jusqu’à la fin février de la deuxième année suivante (comme c’est déjà le cas en Hesse). Le fisc peut exiger le dépôt anticipé de la déclaration selon une réglementation précise (par ex. solde à payer ou d’après l’analyse du risque) ; le délai doit être d’au moins quatre mois. En cas de retard de dépôt ou de paiement, une pénalité de retard par mois entamé d’au moins € 25,00, soit 0,25 % du solde dû (après déduction des acomptes et crédit d’impôt) sera automatiquement exigée. La pénalité de retard maximale est maintenue à € 25.000.

En cas de projets pas encore réalisés dont les conséquences fiscales ne sont pas claires, il est possible de demander un agrément au centre des impôts compétent qui sera facturé. Dorénavant, pour des demandes à partir de 2017 et afin d’assurer un traitement rapide par le fisc, l’agrément doit être accordé ou refusé dans les six mois suivant la réception de la demande. En cas de non-respect, le fisc doit le notifier et en indiquer les raisons.


Nouvelles modifications de la Loi allemande sur le travail temporaire prévues au 1.1.2017

Durée maximale de la mise à disposition de personnel, obligation de détermination et de concrétisation, etc. limitent à l’avenir les possibilités de travail temporaire

Selon la future définition légale, des salariés sont mis à disposition pour des prestations de travail quand ils sont inclus dans l’organisation de travail de l’entreprise utilisatrice et soumis à ses instructions. À l’avenir, les contrats d’intérim devront être définis expressément comme « contrat de mise à disposition de personnel » et les noms des salariés intérimaires devront y être mentionnés individuellement (obligation de détermination et de concrétisation). Une violation de cette obligation ne fera pas uniquement l’objet d’une sanction mais elle justifiera également un contrat de travail avec l’entreprise utilisatrice. Des modèles de contrats d’entreprises échoués, qui se révèlent être un intérim de personnel, ne pourront plus être récupérés par une soi-disant autorisation par précaution. La requalification d’un contrat de travail entre l’entreprise utilisatrice et le salarié intérimaire ne sera pas retenue si l’intérimaire déclare dans un délai d’un mois qu’il ne désire pas maintenir son contrat de travail avec l’entreprise de travail temporaire.

La durée maximale de mise à disposition de personnel sera à l’avenir limitée à 18 mois avec toutefois d’éventuelles dérogations prévues par des conventions collectives spécifiques à la branche d’activités. Des entreprises non soumises à des conventions collectives peuvent également appliquer de telles règles par le biais des accords d’entreprise jusqu’à une durée maximale de 24 mois, cependant seulement si elles entrent dans le champ d’application de ladite convention collective. Un dépassement de la durée maximale de mise à disposition selon les critères précédemment cités fait également supposer la fiction d’un contrat de travail entre l’entreprise utilisatrice et l’intérimaire.

Une mise à disposition en chaîne, intermédiaire ou successive sera dorénavant expressément interdite par la loi, bien que la violation seule n’engendre pas de contrat de travail fictif. Cependant un contrat de travail entre le salarié intérimaire et une entreprise utilisatrice intermédiaire peut être justifié, si celle-ci ne respecte pas les nouvelles obligations légales (obligation de détermination et de concrétisation ou durée maximale de mise à disposition) ou si elle ne détient pas d’autorisation pour la mise à disposition de personnel.

Le principe d’égalité de traitement sera renforcé de sorte que des dérogations applicables dans certaines branches – par exemple par le biais de conventions collectives spécifiques – ne seront plus possibles à long terme. En effet, à l’avenir, la rémunération des intérimaires devra être mise au niveau de celui du personnel permanent de l’entreprise utilisatrice au plus tard après 9 mois (Equal Pay). Des dérogations conventionnelles restent possibles, toutefois à condition que le salaire de l’intérimaire atteigne, au plus tard dans les 15 mois, le salaire selon la convention collective applicable d’un salarié comparable dans la même branche d’activités et que l’élévation progressive du salaire commence après une période d’initiation de maximum six semaines.

Cependant, le principe d’égalité (Equal Pay) est présumé atteint quand des salariés intérimaires perçoivent la rémunération prévue par la convention collective applicable dont bénéficie un salarié comparable de l’entreprise utilisatrice – ou s’il n’en existe pas, un salarié comparable dans une branche d’activité du ressort de ladite convention. C’est-à-dire que le principe fondamental d’égalité n’octroie pas aux salariés intérimaires de rémunération dépassant les salaires selon la convention collective applicable dont bénéficie éventuellement le personnel permanent de l’entreprise utilisatrice.

Selon la nouvelle législation, il est interdit d’embaucher des salariés intérimaires durant un conflit social afin d’éviter aux entreprises utilisatrices d’avoir recours à ces intérimaires comme briseurs de grève. Cette règle est valable – que les salariés intérimaires soient d’accord ou non – ils ont donc quasiment l’« obligation de faire grève ».

En ce qui concerne les questions de codétermination, il est défini que les salariés intérimaires dans l’entreprise utilisatrice sont à prendre en compte pour le calcul des seuils. Sauf pour la question d’une négociation forcée d’un plan social de l’entreprise en difficulté, cela est valable aussi bien en ce qui concerne la codétermination des comités d’entreprise que la co-gestion au conseil de surveillance.

Enfin, les employeurs de droit public seront privilégiés par les nouvelles règles car la Loi sur le travail temporaire n’est en grande partie pas applicable dans ce domaine, sauf s’il existe des conventions collectives pertinentes.


GGV vous informe sur GGV

Stephan Lesage-Mathieu (bureau de Paris) et son équipe ont, à l’occasion d’un RDV GGV, le 23/06/2016, exposé les nouvelles règles qui s’appliqueront aux contrats, en droit français, à partir du 01/10/2016.

A l’occasion d’une conférence organisée par Thomson Reuters et l’AFIC le 13/07/2016, Bénédicte Querenet-Hahn (bureau de Paris) est intervenue sur les impacts pour les entreprises du projet de loi Sapin II sur la lutte contre la corruption.

Steffen Paulmann et Annika Jo Heinrich (bureau de Francfort) ont récemment publié, dans La Semaine Juridique Entreprise et Affaires, un article sur la co-gestion dans les sociétés allemandes et leurs filiales dans l’Union Européenne. Nous vous en envoyons volontiers un exemplaire.


L’Equipe Franco-Allemande de GGV

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